Au sud-ouest de la province du Lualaba, le Territoire de Sandoa tente encore de respirer sous le poids de l’abandon. Ici, voyager est devenu un exploit réservé aux plus téméraires. Les routes, censées relier les hommes et les rêves, sont désormais les symboles d’une lente agonie territoriale.
Des routes fantômes, vestiges d’un autre temps
Autrefois artères vitales du développement, les axes Lumbidi–Kayembe Mukulu, Tshipao–Tshimbalanga et Mass–Kapanga sont aujourd’hui devenus des champs de ruines. Cratères béants, ponts éventrés, mares de boue infinies : le réseau routier ressemble à un champ de bataille abandonné.

Chaque averse transforme les pistes en torrents impassables. Les véhicules, même les plus robustes, s’y enlisent comme aspirés par la terre. Certains tronçons sont si dégradés qu’ils semblent avoir tout simplement disparu, avalés par le temps et l’indifférence.
La Sandoa–Dilolo, autrefois colonne vertébrale commerciale du territoire, n’est plus qu’une succession de pièges. Nids-de-poule géants, glissements de terrain et ravins font de chaque trajet un péril. Là où la route hésite, c’est la rivière Kamafika qui tranche : sans pont digne de ce nom, elle décide souverainement du passage ou de l’isolement.
Rivières en furie, villages isolés

En plus des routes dévastées, les habitants doivent affronter des rivières qui débordent à la moindre pluie. Lukongolo, Kalala, Luthudweji… chacune impose sa loi, coupant les rares communications existantes.
Sur la Sashila, le seul moyen de traverser reste la pirogue artisanale, avec tous les risques que cela implique. Faute d’alternative, des voyageurs dorment parfois à la belle étoile, exposés aux dangers de la brousse. Les plus chanceux parviennent à traverser ; les autres attendent des jours entiers, livrés à l’incertitude.
À Terre Noire, dans la chefferie de Tshibamba, la situation est encore plus dramatique. Dès les premières pluies, la piste devient un fleuve, balayant toute tentative de circulation.
Un quotidien de survie pour les habitants
Pour les habitants de Sandoa, la vie est devenue un exercice permanent de résilience. Les paysans voient leurs récoltes pourrir sur place, faute de pouvoir les acheminer vers les marchés. Les élèves, quant à eux, doivent patauger des heures dans la boue pour atteindre des écoles parfois à moitié désertées.
Dans ce chaos, la santé publique paie aussi un lourd tribut. Sans route praticable, de nombreux malades expirent avant même d’atteindre le moindre centre de santé. Chaque kilomètre devient une épreuve, chaque déplacement, une épreuve de force.

Et pourtant, malgré les souffrances, c’est avec un courage sans relâche que les Sandoanais tentent de survivre. Certains jeunes, armés de simples pelles et de planches de bois, improvisent des réparations de fortune pour rendre les routes à peu près praticables. Mais sans appui institutionnel, leurs efforts restent dérisoires face à l’ampleur du désastre.
Silence radio du côté des autorités
Face à cette situation dramatique, l’État et les autorités provinciales brillent par leur mutisme. Les promesses de réhabilitation, répétées à chaque période électorale, se heurtent à une réalité implacable : sur le terrain, rien ne bouge. Le silence officiel est devenu plus bruyant que toutes les revendications.
Pas de plan d’urgence, pas de chantier annoncé, pas de calendrier de réparation : à Sandoa, l’oubli semble avoir été élevé au rang de politique publique. Les habitants, quant à eux, oscillent entre colère sourde et résignation amère.
« Nous existons seulement sur les cartes administratives », ironise un habitant de Kayembe Mukulu.
Vers un isolement total ?
Sans intervention rapide, Sandoa court tout droit vers l’isolement absolu. Un territoire entier risque de se transformer en une enclave coupée du monde, où seules la misère et l’abandon continueront de circuler librement.
Les conséquences économiques seraient dramatiques : pertes agricoles massives, déscolarisation croissante, désertification progressive des villages. Sans parler du désespoir social qui ronge déjà une jeunesse condamnée à l’immobilisme.
Une urgence vitale
Les routes de Sandoa ne demandent pas la lune. Seulement de la considération. Et un minimum d’investissements.
À Sandoa, la boue engloutit les routes, mais pas encore l’espoir.
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